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mercredi 17 septembre 2014

Die Verrufenen - Gerhard Lamprecht - 1925

Robert Kramer sort de prison. Il monte dans un fiacre qui l'emmène vers la maison où vit son père tandis que Gustav, l'un de ses ex copains de taule, le raille pour sa profession d'ingénieur qui ne lui apporte rien de plus qu'à lui qui n'a pas fait d'études. 
Devant la porte de l'appartement, la bonne met le verrou à sa vue et court prévenir le père qui s'occupe de sa collection de timbres qu'il range soigneusement avant de se rendre à l'entrée pour annoncer à son fils qu'il n'existe plus pour lui. Dans un mouvement de révolte Robert fait sortir la chaine de sécurité de ses gonds et pénètre dans l'appartement. Après un long échange de regards, il rassure son père en lui disant qu'il ne le reverra pas.
Plus tard il se rend chez sa fiancée et demande un rendez vous à sa mère. Celle-ci est soulagée de lui présenter son beau-fils, ne sachant pas comment lui annoncer que sa fille s'est mariée durant son séjour sous les verrous.
Robert cherche du travail, il erre à travers la ville, chacune de ses prises de contact se solde par une réponse négative. Désespéré Robert finit à la soupe populaire où il trouve gite et couvert. Dans le dortoir un homme lui demande s'il sait coudre et l'emmène le lendemain chez un chiffonnier qui lui jette une veste à repriser. Robert demande à être payé après une journée de travail mais se rend compte que l'employeur n'a que du schnaps à lui offrir en échange de son labeur ce qui ne semble pas gêner son compagnon d'infortune. Celui-ci l'emmène dans une gargote ou des amis fêtent un anniversaire. Désespéré à la vue de tous les consommateurs minables qui glandent dans la salle, Robert se lève et s'en va. Il tente alors de se suicider mais une jeune femme qui fait le trottoir l'en empêche. Emma, c'est son nom, lui offre un repas puis l'emmène chez elle où il peut dormir enfin. Robert ne conçoit pas de vivre sans travailler et souhaiterait avoir une machine à coudre pour remonter la pente. Son copain Gustav dérobe l'objet de son désir chez les chiffonniers qui ont été arrêtés par la police et Robert se lance dans la production de sacs de jute qu'Emma l'aide à vendre.



Un film mi doux mi amer, surtout triste dans le fond. Le spectateur se trouve à la fois au coeur de la vie de ces déshérités tout en gardant un pied à l'extérieur. Le cinquième état est le nom donné à ce monde parallèle dans lequel vivent les déshérités. Grâce à ce film tourné par le réalisateur engagé Gerhard Lamprecht vous pouvez vous plonger dans les quartiers pauvres de Berlin des années 20, ses bars, ses rues, ses habitants et leur manière de vivre.

Chacun développe à sa manière une façon de contrer le sort et de lutter contre la misère, certains boivent, d'autres se laissent aller ou cherchent à se tuer, les uns se foutent de tout et sont prêts à narguer la loi, quelques uns sont malins et débrouillards, ils s'en sortent plutôt bien, d'autres triment comme des fous et s'usent dans des travaux de misère. La palette des réactions est vaste et couvre une panoplie de comportements, la violence ou la douceur, la révolte ou l'abattement, l'action ou l'oisiveté, etc...
Parmi tous les protagonistes certains trouvent la force de s'intéresser aux autres, d'autres ne peuvent s'occuper d'autrui. Seuls les enfants semblent vivre dans un monde parallèle, une autre planète où il est encore possible de jouer, d'inventer et de rêver malgré le décors misérable dans lequel ils vivent.
On ne sait pas grand chose du crime que Kramer a commis et on apprendra qu'il a été condamné pour parjure (Meineid), "quelquefois on commet de tels actes pour rester honnête avec soi-même" sera la seule explication donnée au photographe qui deviendra son ami.

Il faut avouer que Bernhard Goetzke est intriguant, son visage est comme taillé dans la pierre, ses expressions se résument à somme toute peu de choses, mais il suffit d'une mâchoire serrée, d'yeux baissés, d'un froncement de sourcil ou d'un regard lancé par dessous pour qu'on imagine un être sous tension prêt à exploser ou à la merci d'émotions qui semblent jaillir des profondeurs de son être.
Comme sa personne semble rigide et que son visage est plutôt dur, Robert Kramer ne semble pas enclin au désespoir. Il subit les velléités de la vie de façon plutôt stoïque. On comprend que sous la dureté se cache un réel désespoir lorsqu'il tente de se suicider. Il n'y a aucune forme de pathos dans ce film.
Il connaitra trois femmes très typées : La riche et ambiguë Gerda, Emma la fille de joie au coeur gros comme une maison et Regine, la soeur de son employeur qui lui permettra de retrouver sa dignité et le cours d'une vie proche de ses aspirations.

On notera de nombreuses scènes symboliques, les enfants qui jouent devant l'enseigne du croque mort, l'ouverture des rideaux sur un jour nouveau après la nuit de la confession de Robert à son nouvel employeur, la machine à coudre ou l'art de la photographie qui permettent un nouveau départ, ou très marquantes comme le face à face du père et du fils à travers la porte presque fermée de l'appartement familial jusqu'à ce que le fils baisse les yeux sous le regard dur de son père, et les fondus enchainés entre les deux mondes qui se côtoient mais qui sont si diamétralement différents, sont les scènes qui me viennent en tête.

L'accompagnement musical de Donald Sosin est juste parfait de sensibilité. On trouve ce film avec Die Unehelichen aux éditions
Film Museum

100 minutes environ

Titres français : Les déshérités de la vie ou le 5ème état

Aud Egede-Nissen ...
Emma
Bernhard Goetzke ...
Robert Kramer
Mady Christians ...
Regine Lossen
Arthur Bergen ...
Gustav
Frigga Braut ...
Waschfrau
Georg John ...
Waschfraus Mann
Eduard Rothauser ...
Rottmann
Frida Richard ...
Frau Heinicke
Paul Bildt ...
Herr Kramer
Hildegard Imhof ...
Gerda



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