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mercredi 30 juin 2021

La chute de la maison Usher - Jean Epstein - 1928

 


Après avoir traversé des landes sauvages et sombres, un voyageur nommé  Allan arrive dans un pub où les consommateurs le dévisagent de manière suspicieuse. Les visages se ferment lorsqu'il demande à être mené à la maison des Usher. 

Il finit par trouver un transport mais le conducteur l'abandonne loin de la maison, tandis qu'elle se dresse telle un spectre à travers le brouillard.

Sir Roderick accueille son ami avec joie mais Allan est vite englué dans l'atmosphère qui règne dans la maison très délabrée. Comme ses prédécesseurs avant lui, Roderick est en train de peindre un portrait de sa femme, Madeline. Mais plus le tableau avance, plus Madeline se sent mal, se dépersonnalise et perd pied. Le docteur venu spécialement pour elle n'y comprend rien et Madeline finit par trépasser.

Allan et Roderick chargent Madeline sur une barque et rament en direction d'un petit tombeau, un voile de mariée dépassant du cercueil trainant dans l'eau...

 


Outre les effets spéciaux, la grande force de ce film réside dans des décors minimalistes, des acteurs captivants et intrigants, des images contrastées et sombres qui mettent en scène des visages hypnotiques (voire extatiques vers la fin) ou des mains crispées secondés par des feuilles mortes rampant telles des araignées poussées par le vent ou des rideaux ondulant comme s'ils cachaient des formes humaines. L'ambiance va crescendo et le balancier de l'horloge fait monter la tension. La caméra est à la fois statique et mobile, créant ainsi comme une entité supplémentaire lorsqu'elle se déplace rapidement dans les couloirs délabrés. Le temps est lui aussi intimement lié aux humeurs des protagonistes, que ce soit le rythme lent ou rapide, ou la météo, brouillard ou orage n'apportent aucune sérénité. Le moindre détail prend une importance disproportionnée. Des détails, le film en est truffé !

La décomposition touche à la fois les protagonistes et la maison qui se dégrade inexorablement. La fin et simplement époustouflante de maitrise visuelle.

Je me demande quand même pourquoi Epstein a pris le parti de mettre une femme et son mari plutôt qu'un frère et sa soeur jumelle comme dans la nouvelle d'Edgar Allan Poe ? Il me semble que les jumeaux apportent davantage de clés en termes de symboles psychologiques. Nul doute que Roderick a l'esprit dérangé. En effet, un intertitre présente sa femme comme dominant tout de la vie de son mari, avec sa "nervosité tyrannique". Or elle semble plus saine d'esprit que son mari.
A noter le vide extraordinairement meublé. Roderick ne fait rien durant tout le film, à part peut-être appliquer quelques coups de pinceau sur la toile ou gratter de sa guitare. En face de lui, Allan lit beaucoup. Quant à Madeline elle a tout du spectre dès le début du film !

Musique : 

La cinémathèque française, voir l'avis et les détails très complets sur ce film ici

Inspiré par cette histoire d'Edgar Allan Poe traduite en français par Baudelaire.
Claude Debussy a composé un opéra inachevé en un acte et deux scènes.

Marguerite Gance était la femme d'Abel Gance que l'on aperçoit dans le bar au début du film. 

64 minutes


Jean Debucourt ... Sir Roderick Usher

Marguerite Gance ... Madeleine Usher

Charles Lamy ... Allan - the Guest

Fournez-Goffard ... The Doctor

Luc Dartagnan ... Bar Customer

Abel Gance ... Bar Customer


 

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